samedi 7 avril 2012

Jour de silence à Tanger de Tahar Ben Jelloun


Un très beau livre que j’ai dévoré en quelque temps dans le cadre du défi lecture : « Un mot, des titres » proposé par Calypso sur son blog. Un mois et demi pour choisir avec attention un livre comportant le mot du mois et le lire.. Pour cette  session le mot est JOUR !  

Après avoir arpenté les rayons de la bibliothèque municipal du 14ème je suis tombé sur ce livre blanc avec un liseret rouge et pour titre Jour de silence à Tanger. Les premières lignes de la première page m’ont séduitent immédiatement. En une phrase j’ai été conquise. Je me suis dit qu’avec un style comme le sien, Tahar Ben Jelloun ne pouvait que me faire voyager au Maroc, dans le siècle passé avec poésie.

« C’est l’histoire d’un homme leurré par le vent , oublié par le temps et nargué par la mort »


Un monologue passionnant d’un père se faisant vieux et refusant durement cette fatalité.  Il vit au Maroc à Tanger dans une maison où seul reste sa femme. Ses enfants ne viennent plus le voir, et hélas, ses amis sont tous déjà partis. Sa femme au quotidien s’occupe de lui et essaye de faciliter sa vie de malade. Mais pour ce grincheux personnage, cette femme ne fait que le rabaisser...Enfin, c’est ce que nous conte cet homme abîmé par le temps.

Car il  ne faut pas se fier à lui. Il  rouspéte sur tout ce qui l’entoure en maudissant le reste des hommes. Cloué dans son lit, il a le temps de revivre une nouvelle fois sa vie, sa jeunesse et de faire un bilan approfondit de chaque instant passé à Tanger. Il se remémore ses amours perdus, ses échecs, ses combats, ses victoires, sa famille et ses amis hauts en couleurs.  Mais un homme se doit d’être fort et ne doit pas être sensible afin de ne pas glisser dans la mélancolie. Il dresse entre lui et ses émotions un mur immense. Il sera fort jusqu’au bout. Il ne flanchera pas. Cette détermination entraine de la mauvaise foi de la part du narrateur. Que l’on aime malgré tout.

" L'ennui, c'est quand la répétition des choses devient lancinante, c'est lorsque la même image s'appauvrit à force d'être toujours là. L'ennui, c'est cette immobilité des objets qui entourent son lit, des objets aussi vieux que lui ; même usés, ils sont toujours là, à leur place, utiles, silencieux. Le temps passe avec une lenteur qui l'agace. "


Car bien que dans la majeure partie du livre ce vieil homme ne fait que s’en prendre à tout ce qui l’entoure, on s’attache à lui. On s’attache à cette vie que l’on ne connaît pas,  à cette époque passée si bien racontée. Les mots durs qui sortent de la bouche du vieil homme sont tout aussi doux que dénigrants. On sent  dans chaque reproche de l’amertume, du regret et beaucoup d’amour.

"La mort est un vaisseau porté par les mains des jeunes filles ni belles ni laides qui passent et repassent dans une maison en ruine, sous le regard incrédule et méfiant de celui qui, d'une main sûre, repousse cette image."


Toutes les émotions qui se dégagent, sont pour moi l’ œuvre de l’auteur. Les mots sont justes, les phrases belles et l’écriture poétique. Tahar Ben Jelloun pose ses mots de façon si légère que l’on se croirait à Tanger. L’histoire sans intrigue du narrateur prend sens sous les mots choisis avec délicatesse et l’on s’attache à l’homme qui nous est décrit. Je le redis, dès les premiers mots j’ai été envoutée ! Mon papa a fait une remarque sur la manière d’écrire de l’auteur qui m’a parut très juste. Cette façon lente d’écrire, d’imager et de raconter est significative du tempérament arabe. Le rythme de vie est différent. La manière de s’exprimer tout en finesse, en choisissant ses mots et en faisant trainer les phrases. Ici, ça s’y prête à merveille. On est davantage plongé dans l’esprit marocain du livre.

Pour terminer, et vous le redire. J’ai énormément apprécié lire Tahar Ben Jelloun. Dès que j’en aurai l’occasion, Le racisme expliqué à ma fille sera lu. Beaucoup de poésie, de belles phrases et une belle ambiance qui se dégage de chaque page.
Lisez le. N’attendez plus. Tahar Ben Jelloun jury du Prix Goncourt va vous faire voyager. En ces temps d’élections présidentielles ça ne peut que vous faire du bien. 



Bonne lecture ! 


                                          

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