Pour Elio,
un peu de soleil de ces terres
qui coule dans tes veines
qu’il illumine ton regard
Le soleil des Scorta, c’est typiquement le
livre qui ne me tente pas aux premiers
abords. Un titre bof, une couverture bof, un format bof, et une quatrième de
couverture lu en diagonale. Mais c’est typiquement le genre de livre, que
j’aime dès les premiers mots. Un style d’écriture poétique, une histoire dure
et sensible. Un livre que je vais m’empresser d’ouvrir à chaque moments de
stand by. C’est aussi le livre qui, une fois terminé, reste dans ma mémoire.
Bref, un réel plaisir.
D’un côté l’auteur, a été Goncourt 2004. Certains Goncourt ne valent pas d’être
lu (suivez mon regard), mais celui là. JE DIS OUI.
Idées un peu en vrac. C’est le cœur et la fatigue qui parlent.
Nous voilà au bout du monde, pensa l’homme. Je rêve depuis quinze ans à cet instant. » [...]L’âne atteignit le sommet de ce qui semblait être la dernière des collines du monde. C’est alors qu’ils virent Monteppucio. L’homme sourit. Le village s’offrait au regard de sa totalité. Un petit village blanc, de maisons serrées les uns contres les autres, sur un promontoire qui dominait le calme profond des eaux. Cette présence humaine, dans paysage si désertique, dut sembler bien comique à l’âne, mais il ne rit pas et continua sa route.
Violence, douceur, compassion, mélancolie,
voilà ce qui nous est raconté dans ce livre.
Une famille se bat génération après génération pour garder la tête haute et
lutter contre le mauvais sort. Elle le fait avec une volonté qui brise le cœur
car les Scorta sont né de rien. Dès le commencement il n’y a pas même une once
de bonheur et de joie dans leur vie. Il a fallut suer chaque jour pour
construire leur avenir.
Tout se passe dans le petit village de Monteppucio. Les générations se
succèdent, tout le monde se connait, tout le monde va se détester, se
pardonner, se diviser, se déchirer, se reconstruire. Le temps va aider les cœurs à se forger, et les âmes à devenir plus belles. Car en Italie, dans les
régions les plus reculées, il fait parfois bon vivre. Mais pas tout le temps.
Après la mort de Luciano, le premier des Scorta, sa fille et ses trois fils
font la promesse de partager à leurs neveux et nièces un petit bout de leur
savoir, un petit secret profondément enfouit. Et surtout, ils font une promesse
encore plus belle, celle d’être heureux. D’être heureux ensemble, en famille.
Ils étaient maintenant tous épuisés comme après une bataille. Épuisés et heureux. Ils avaient joui, ensemble, d’un peu de vie. Ils s’étaient soustraits à la dureté des jours. Ce repas resta dans toutes les mémoires comme le grand banquet des Scorta. Ce fut la seule fois où le clan était au complet. [...] Ils étaient tout à leur bonheur sous le regard généreux de Raffaele, que le spectacle de ses frères dégustant les poissons qu’il avait lui-même grillés faisait pleurer de joie.
L’auteur nous conte ces années difficiles avec une telle douceur que l’on ne
peut pas détester les Scorta. On ne peut pas se détacher d’eux. On ne peut pas
les haïr alors qu’on apprend qu’ils ont tué, pillé, dépouillé et brûlé leurs
biens, leurs voisins...
La force qui unie la famille est plus forte que tout. Au fil des pages, on
devient nous aussi un membre de la famille Scorta. On connait leurs
faiblesses, leurs torts, leurs secrets, leurs envies. On sait tout d’eux, et on
apprend à les aimer.
Comment ne pas les aimer après tout ce qu’ils ont vécut ? Comment ne pas
partager leur cause quand le sort est contre eux ? Comment ne pas les
aimer quand leur seul souci c’est d’être simplement heureux en famille ?
Tout est raconté avec poésie. Les mots choisis rendent plus doux la situation.
On ressent vraiement cette volonté de protéger les siens. Les Scorta ne lâchent
rien. Ils sont sous le ciel brûlant des Pouilles, et c’est là que chacun mourra
en paix. Tous se souviendront des moments de joies passées avec leur famille. Ces moments seront mêlés
aux moments de douleur et aux échecs vécus. Mais aucun d’eux ne regrettera de
ne pas avoir quitté Montepuccio et vu le monde.
Il lui fallait le ciel entier, plein d’étoiles mouillées pour épancher sa mélancolie. Il ne demandait rien. Que le laisse simplement glisser au fil de l’eau en abandonnant dernière lui les tourments du monde.
« Domenico
lâcha d’un ton sans appel un magistral « Ma van fan’ culo ! »
qui fit rire sa sœur aux éclats.
Ils firent une halte sur le bord de la route et au fond ils étaient heureux de
cette occasion qui leur était offerte de reprendre leur souffle et de
contempler le bout de chemin qu’il restait à faire ».
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